20. novembre 2019

La fonte des glaciers est un sujet qui concerne tout le monde, dit Eric Petrini. C’est pourquoi, il a trimballé à fin septembre son système microphonique jusqu’au glacier du Pizol, a exhorté la foule à respecter l’environnement et récolté des paroles désagréables.

tob. Le serveur pose un journal suisse célèbre sur la table voisine. Sur la première page, en gros titre avec image : « Bien sûr, nous avons le droit d’aimer nos voitures. » Vient ensuite la phrase selon laquelle le débat climatique a jeté le discrédit sur la voiture. « Quelle bêtise », commente Eric Petrini. Il est aumônier de paroisse à Mels, au pied du Pizol, et aime les discours explicites.

Au printemps 2019, on a demandé à sa paroisse catholique si un représentant de l’Eglise pouvait participer à la cérémonie de commémoration au Pizol. Les organisateurs, dont faisaient partie des organisations ecclésiastiques mais aussi l’Initiative des Alpes, auraient préféré un représentant de haut rang de l’Eglise, un évêque par exemple. Mais ceux-ci ont d’autres devoirs à remplir le dimanche.

Socialement important

Eric Petrini semblait être l’homme de la situation puisque la demande arriva chez lui. Non, dit-il, je ne suis pas un militant pour le climat. L’Eglise néanmoins doit prendre position sur cette question essentielle. « Nous devons montrer que nous ne sommes pas les vestiges d’un groupe religieux et que nous restons socialement importants », dit-il. Lui, l’homme des plaines de 38 ans, né à Trèves d’une mère allemande et d’un père italien, travaille depuis 12 ans en Suisse et depuis une année seulement à Mels. Il a accepté la demande tout en sachant qu’il ne serait pas simple de s’exprimer sur les objectifs de l’initiative pour les glaciers resp. sur les mesures à prendre pour atteindre les buts de l’accord de Paris.

Et pourtant, ce n’est pas uniquement la fonte du glacier du Pizol qui lui tenait à cœur mais les êtres humains et leurs rapports avec la Terre. Dans son sermon, il l’a formulé ainsi : « Nous nous sommes trop habitués à exploiter la nature et à gaspiller les trésors donnés par Dieu. Nous avons cru trop longtemps être supérieurs à la nature et pouvoir la contrôler. L’homme aime être le roi de la Création mais il a oublié de se montrer digne de ce privilège. » Le profit est devenu plus important que la durabilité. Ainsi, l’homme détruit non seulement son environnement vital mais aussi celui des générations à venir.

Toujours pour la justice

C’est la première fois qu’il a participé à une telle manifestation. Sa prestation au Pizol lui a valu des louanges et l’attention des médias mais aussi des critiques. On lui a reproché de s’être embrigadé dans une manifestation de propagande et qu’il aurait été plus judicieux en tant que représentant de l’Eglise de rester neutre sur la question du réchauffement climatique. Eric Petrini ne se laisse pas déconcerter pour autant. L’éthique religieuse lui commande de s’engager pour la justice, la paix et pour préserver la Création.

Le changement climatique est concerné par ces trois points : « Je m’engagerai toujours pour la justice et je ne veux pas éviter, comme le font d’autres représentants ecclésiastiques, pour des raisons de faiblesse, d’indifférence ou de confort de parler de sujets délicats comme les conséquences du changement climatique. » L’homme est responsable de la hausse mondiale des températures.

L’homme et Dieu

Il lui a fallu deux heures pour transporter jusqu’au glacier du Pizol le système de microphones ainsi que du pain et du cidre, 15 kilos en tout. Quand il a vu arriver les 250 personnes, il était d’abord nerveux.

Eric Petrini a étudié et travaillé auparavant dans le Tyrol du sud. « Là-bas, je n’avais pas le droit de chanter en même temps dans les chorales des églises allemandes et italiennes », dit-il, ce qui l’a énormément dérangé. Il se sent bien ici en Suisse et cela lui plaît que le multiculturalisme soit inscrit dans la Constitution suisse. Il continuera de prêcher à Mels, de donner des cours de religion, d’organiser des évènements religieux et de s’engager pour que les gens changent leurs comportements afin de préserver la diversité et la beauté de ce monde. Avec l’aide de Dieu également.