18. juillet 2023

Le 2e tunnel n’est pas encore construit qu’une exploitation sur quatre voies est revendiquée à haute voix. L’Initiative des Alpes s’engage activement contre la destruction de la protection des Alpes.

L’été dernier, des mordus de la route tels que le conseiller national UDC Walter Wobmann, ont demandé l’exploitation sur quatre voies du futur tube routier du Gothard. Cette idée semble avoir malheureusement pénétré aussi les milieux bourgeois. Au sujet des bouchons et du trafic de contournement par les villages uranais, Georg Simmen, député uranais PLR, déclarait que « le problème serait résolu en ouvrant les quatre voies au Gothard ». Mais pour cela, il faudra modifier l’article sur la protection des Alpes. Il est évident que des capacités routières supplémentaires au Gothard attireront encore plus de poids lourd et de voitures et ne feront que déplacer les engorgements. À ce propos, le chercheur Lewis Mumford disait en 1955 déjà que « construire et exploiter plus de routes pour réduire les embouteillages revenait à ouvrir la ceinture de son pantalon pour perdre du poids. »

Offensive contre la protection des Alpes

L’article sur la protection des Alpes (art. 84) ancré dans la Constitution fédérale après l’adoption de l’initiative des Alpes stipule : « La capacité des routes de transit des régions alpines ne peut être augmentée. » Le Conseil fédéral de son côté avait déclaré lors de la votation sur le 2e tunnel au Gothard : « Un OUI garantit le respect de l’article sur la protection des Alpes. Le trafic est limité par la Constitution et par la loi. »

Les promesses de 2016

Le Conseil fédéral avait mentionné dans le matériel de vote : « Avec la solution proposée par le Conseil fédéral et le Parlement, il n’y aura pas d’augmentation de la capacité. C’est ce que garantissent également l’article constitutionnel sur la protection des Alpes et la nouvelle restriction inscrite dans la loi : après la réfection du tunnel du Gothard, seule une voie par sens de circulation sera ouverte au trafic. L’autre voie servira de bande d’arrêt d’urgence. » Ces promesses ont été réitérées et confirmées plusieurs fois lors de la campagne de votation en 2016. Il est inquiétant de constater que quelques années plus tard, elles ne valent plus rien dans certains milieux.

Celles et ceux qui se sont prononcés en 2016 en faveur de cette construction de 2 milliards de francs l’ont fait pour des raisons de sécurité. Au lieu de rouler 17 km dans une galerie bidirectionnelle, deux tubes comprenant chacun une voie par sens de circulation et une bande d’arrêt d’urgence garantiraient plus de sécurité. En cas d’exploitation sur quatre voies, il n’y aurait plus de bandes d’arrêt d’urgence. Ce qui réduit la sécurité et contredit massivement l’argument de sécurité mis en avant lors de la campagne de votation.

Déplacement du problème

Le tunnel routier du Gothard forme un goulot d’étranglement et même en l’élargissant, les bouchons ne disparaîtront pas comme par enchantement, mais seront tout simplement reportés ailleurs. Au Tessin, à Chiasso par exemple ou dans les régions de Lucerne et de Bâle. Déplacer les bouchons d’un lieu à un autre est aberrant et n’est pas dans l’intérêt de la population suisse déjà excessivement incommodée par le trafic.

Le Gothard fait parler de lui

Ailleurs en Suisse, il y a des embouteillages et beaucoup de trafic, mais cela ne fait de loin pas autant de bruit qu’au Gothard. À Lucerne, Muttenz (BL), Schönbühl (BE), Wallisellen (ZH), Würenlos (AG) ou encore à Renens (VD). Ici, ce sont en moyenne 107 000 véhicules qui circulent quotidiennement (TJM année 2022), parfois plus. Avec 18 600 véhicules journaliers, on pourrait donc qualifier la situation routière au Gothard de calme. Il est vrai cependant que lors des jours fériés et des vacances d’été, le trafic y augmente considérablement et provoque des embouteillages. Mais la longueur des bouchons ne peut être comparée à celle d’engorgements sur d’autres tronçons routiers puisqu’un système de feux de signalisation régule le trafic devant le tunnel routier.

Le trafic de contournement

Le trafic de contournement reste le plus grand problème lors d’embouteillages au Gothard et au San Bernardino. D’innombrables touristes qui transitent à travers les Alpes essaient alors de contourner les bouchons en prenant un autre axe ou des routes de villages de montagne, au détriment de la population locale d’Uri, du Tessin, des Grisons et du Valais.

Le trafic de transit doit rouler sur les autoroutes. Ce n’est pas une exploitation sur quatre voies au Gothard, mais un guidage et une gestion du trafic efficace et futée qui réglera au plus vite ce problème. Car plus de routes feront grossir encore l’avalanche de trafic. Ce qui aboutira très rapidement à un trafic de contournement encore plus dense.

Stopper l’avalanche de trafic

Ouvrir les quatre voies ne résoudra pas le problème du trafic routier transalpin, c’est pourquoi l’Initiative des Alpes apporte des solutions pertinentes.

  • Des offres de transports publics attrayantes (TP) : pour réduire les bouchons au Gothard, le transfert du trafic de personnes vers les TP et de marchandises vers le rail est une mesure efficace. Avec des offres attractives, bien plus de gens se laisseront convaincre de prendre le train (du moins pour faire le plus long trajet de leur voyage). Les infrastructures sont disponibles en Suisse et en Italie.
  • Système de créneau : un système de réservation permettrait de réserver le créneau horaire lors duquel l’automobiliste souhaite traverser les Alpes. Cela réduirait les bouchons efficacement puisque seules (ou presque) les voitures ayant une autorisation circuleraient sur la route du Gothard ou du San Bernardino. Au Brenner, les ministres des transports de Bavière, du Tyrol et du Tyrol du Sud comptent introduire un tel système pour les camions d’abord puis plus tard, pour les voitures éventuellement. Nous demandons au Conseil fédéral, au Parlement et à l’administration d’examiner un tel système de réservation.
  • Péage : un péage pour traverser les Alpes pourrait être introduit sur le réseau national suisse (au Gothard, au San Bernardino, au Simplon et au Grand-Saint-Bernard). Cela atténuerait la croissance dans le trafic. Une conception dynamique permettrait de plus de réduire les pics de circulation. En outre, les recettes générées serviraient à financer des mesures visant à réduire le trafic routier. Il serait essentiel de proposer une solution équitable sous forme de rabais ou d’abonnement à la population locale (du Tessin et d’Uri par exemple).
  • Des mesures contre le trafic de contournement : le problème du trafic de contournement à travers les villages peut être fortement atténué par une gestion du trafic futée. Les mesures suivantes protègent les habitants et l’environnement d’une surcharge de trafic, du bruit et de la pollution :
        • réduction de la vitesse sur l’autoroute et autres routes ;
        • fermeture des entrées et sorties d’autoroute et des routes de col pour certaines catégories de véhicules, par exemple caravanes et camping-cars ;
        • pas d’affichage d’itinéraires de déviation sur les appareils de navigation (GPS) ;
        • interdiction de circuler sur les routes cantonales et communales pour les voyageurs en transit certains week-ends et jours fériés (comme sur la route du Brenner au Tyrol). Ainsi, les bouchons se résorberont dans les villages et les habitants, les transports publics, la police et les services de secours auront la voie libre.