3. janvier 2021

La redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations RPLP, qui est entrée en vigueur il y a 20 ans, est un succès et est devenue en même temps un exemple reconnu dans toute l’Europe. Grâce à elle, la branche des transporteurs routiers suisses payent leurs coûts externes (tels que le bruit, les dommages climatiques, la pollution atmosphérique, etc.) . La RPLP ne couvre peut-être pas l’intégralité des coûts externes, soit 2,65 milliards de francs, mais ses recettes, qui se montent à environ un milliard, en compensent ainsi une partie. Basée sur des critères tels que le poids, la distance parcourue et la norme d’émissions du véhicule, la redevance a fait ses preuves et stimule le transfert du trafic vers le rail. La RPLP incite en permanence l’utilisation de véhicules moins polluants. La révision à venir de la RPLP établira enfin une plus grande vérité sur les coûts, ce qui sera favorable au transport ferroviaire et à la protection de l’environnement.

Bien qu’elle reste source de mésentente entre la législation nationale et l’esprit de compétitivité du secteur de la logistique, la redevance sur le trafic des poids lourds liées aux prestations (RPLP) est un modèle gagnant. Adoptée en 1998 à 57 % par la population, elle est entrée en vigueur au 1er janvier 2001 et connaît depuis un succès. La RPLP a contribué de manière décisive à ce que de nombreuses marchandises, les frets lourds en particuliers, soient davantage transportés par le rail et moins par la route. Bien que le volume total des marchandises transportées à travers les Alpes ait augmenté ces 20 dernières années, le trafic poids lourd sur la route à travers les Alpes a diminué. La croissance dans les transports a pu être absorbée par le rail et la part du fret ferroviaire s’élève actuellement à environ 71 %.
La RPLP a également d’autres effets positifs. Tout d’abord, elle a permis de rendre le parc de véhicules en Suisse plus propre. Les transporteurs routiers renouvellent régulièrement leur flotte de véhicules afin de profiter d’une catégorie d’émissions plus favorable et plus respectueuse de l’environnement. Plus de 60 % des camions qui circulaient jusqu’à fin 2020 sont conformes aux normes d’émissions Euro VI. Ceux-ci comparés aux poids lourds de la catégorie d’émissions Euro I, n’émettent plus qu’un cinquième des émissions nocives d’oxydes d’azote (NOx).

Ensuite, jusqu’à deux tiers des recettes annuelles de plus d’un milliard de francs de la RPLP sont attribués à des projets d’infrastructure ferroviaire tels que celui de la Nouvelle ligne ferroviaire à travers les Alpes NLFA. Le tiers restant aide à financer des mesures contre les émissions des poids lourds à l’échelle cantonale. Enfin, la Suisse peut être fière d’exploiter le réseau de transport de marchandises le plus efficace d’Europe et cela grâce à l’article de protection des Alpes et à la RPLP. La RPLP soutient la protection des Alpes de manière significative puisqu’un modèle modifié de la RPLP a été adopté par plusieurs pays européens comme en Autriche ou en Allemagne.

Exploiter au maximum la RPLP et promouvoir la compétitivité du système ferroviaire

Malgré tous les succès de la RPLP, l’objectif de transfert de maximum de 650 000 camions en transit par les Alpes par année n’est pas encore atteint. 898 000 camions ont en effet traversé les Alpes en 2019, soit 250 000 de trop. Il y a deux raisons à ce dépassement du nombre de poids lourds autorisés à traverser les Alpes. D’une part, la Suisse n’exploite toujours pas au maximum les possibilités de la RPLP actuelle. Le montant maximal négocié avec l’UE pour un niveau moyen d’émissions du parc automobile sur l’itinéraire de référence Bâle-Chiasso devrait s’élever à 325 francs. Dans la réalité, ce montant est de 30 à 50 francs inférieur. D’autre part, les coûts externes du trafic lourd ne sont pas entièrement couverts. L’Office fédéral du développement territorial (ARE) a calculé que le trafic de poids lourds entraînait des coûts externes (environnement, accidents et santé) d’environ 2,65 milliards de francs par an. Cela signifie que, en soustrayant le montant annuel de la RPLP, la branche des transporteurs doit encore à la collectivité environ 1,6 milliard de francs par an. Conséquence : le transport de marchandises par la route est trop bon marché par rapport aux marchandises qui transitent par le rail. En comparant les coûts externes du transport de marchandises en 2017 entre ceux de la route et du rail, il s’avère alors que la marchandise transportée par la route coûte plus cher à la collectivité que le rail. Les poids lourds ont généré des coûts de 9,8 centimes par tkm, dont 3,4, seulement, ont été internalisés par l’entremise de la RPLP. Il en résulte des coûts externes de 6,4 centimes par tkm. Il s’agit là d’un désavantage concurrentiel évident pour le rail alors qu’il est plus propre pour l’environnement. Une meilleure transparence des coûts routiers créerait un équilibre entre les deux modes de transport.

L’Initiative des Alpes est convaincue que la redevance sur les poids lourds est l’élément-clé d’une réglementation du secteur des transports respectueuse de l’environnement. La révision à venir offre l’opportunité d’apporter les ajustements en retard, dans le sens également des objectifs environnementaux et climatiques de la Suisse. Le Conseil fédéral a déjà fait connaître la feuille de route de cette révision. Il présentera sa proposition à la fin 2021 et le Parlement en débattra début 2022. L’Initiative des Alpes estime que la redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations RPLP doit être développée ainsi :

  • Transfert du trafic au rail
    L’instrument RPLP doit continuer d’être utilisé pour le transfert du trafic de marchandises de la route au rail. Son évolution ne devrait en aucun cas entraver l’effet de transfert mais plutôt le renforcer.
  • Transparence des coûts externes
    La RPLP doit refléter de la manière la plus juste possible les coûts des transports routiers y compris les coûts externes. Comme elle ne couvre que le tiers des coûts générés, la RPLP doit nettement augmenter. Les coûts externes comprennent les coûts liés aux accidents, à la consommation d’espace, au bruit et aux embouteillages, et doit donc concerner également les véhicules à propulsion alternative. C’est pourquoi l’Initiative des Alpes demande de ne pas exempter ces véhicules de la RPLP.
    En augmentant le prix de la RPLP, la Suisse suit la feuille de route de l’UE. Avec la directive européenne prévue sur les coûts d’infrastructure, les redevances dans l’UE augmenteront également de manière significative.
  • Tenir compte des émissions de gaz à effet de serre spécifiques
    La future RPLP en accord avec les directives de l’UE doit tenir compte des émissions polluantes, spécifiques à chaque véhicule. La redevance du camion diesel plus polluant sera plus élevée et créera ainsi une incitation à passer à des formes de propulsion neutre sur le plan climatique. Dans le cas de véhicules à propulsion alternative, il faut tenir compte du fait que les camions à hydrogène et électriques occupent tous de l’espace et émettent des émissions telles que du bruit, des microplastiques (usure des pneus) et de la poussière fine due au freinage.

La RPLP a 20 ans: les dates clés de cet instrument de gestion du transfert

La redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations (RPLP) est entrée en vigueur le 1er janvier 2001 et survient après le vote populaire de 1994 en faveur de l’initiative des Alpes qui a marqué un tournant dans l’histoire du transport de marchandises suisse. Mais avant que la RPLP ne deviennent un succès, elle a dû contourner plusieurs obstacles. La révision à venir annonce une ère nouvelle.

27.09.1992 La population suisse adopte l’Arrêté fédéral relatif à la construction de la ligne ferroviaire suisse à travers les Alpes (Arrêté sur le transit alpin) avec 64 % des voix.

20.02.1994 La surprise : le peuple approuve à 51,9 % l’« initiative pour la protection des régions alpines contre le trafic de transit (initiative des Alpes) ».

11.09.1996 Le Conseil fédéral soumet au Parlement le projet de loi sur la redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations.

19.12.1997 Le Conseil national et le Conseil des Etats approuvent le projet de loi sur la RPLP en votation finale.

30.04.1998 L’Association suisse des transports routiers ASTAG soumet des signatures pour un référendum contre la loi fédérale sur la redevance poids lourds liée aux prestations.

27.09.1998 57,2 % de l’électorat suisse approuve la loi fédérale sur la redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations lors du référendum.

21.06.1999 La Suisse signe l’accord sur les transports terrestres avec l’UE. Elle ancre la politique de transfert modal et la conception de la RPLP dans un contexte paneuropéen.

21.05.2000 Le peuple approuve l’accord sur les transports terrestres lors du référendum sur les accords bilatéraux I avec 67,2 % de voix favorables.

01.01.2001 La loi fédérale sur la redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations entre en vigueur. La RPLP est introduite à un taux de 1,6 ct/tkm, dans le même temps que le poids maximum autorisé pour les camions augmente de 28 à 34 tonnes.

01.06.2002 L’accord sur les transports terrestres entre en vigueur.

01.01.2005 Le taux de la RPLP augmente à 2,44 ct/tkm, dans le même temps, le poids maximum augmente à 40 tonnes.

01.01.2008 Hausse du taux de la RPLP à 2,7 ct/tkm et introduction des normes d’émissions : les véhicules Euro 0, Euro I et II sont classés dans la catégorie tarifaire la plus chère (catégorie de redevance 1), les véhicules Euro III dans la classe tarifaire moyenne (catégorie de redevance 2) et les véhicules Euro IV et V dans la classe tarifaire la moins chère (catégorie de redevance 3).

01.01.2017 Déclassement : les véhicules Euro III sont désormais placés dans la catégorie la plus chère et les véhicules Euro IV et Euro V dans la catégorie intermédiaire, les véhicules Euro VI sont dans la catégorie la moins chère.