21. mai 2018

Le 16 mai, nous avons attendu le message du Conseil fédéral relatif à la loi sur le transfert du trafic marchandises, ainsi que le troisième rapport sur le transfert modal. Mais à la clôture de la rédaction, seule était disponible la deuxième étude consacrée à la bourse du transit alpin, confirmant la faisabilité de celle-ci sans modification de l’Accord sur les transports terrestres.

L’Initiative des Alpes est ravie qu’une étude commandée par l’Office fédéral des routes (OFROU) confirme la faisabilité de la bourse du transit alpin (BTA). La BTA vise à limiter le trafic poids lourds à travers les Alpes par la délivrance de droits de transit, à répartir équitablement ces droits de transit entre les différents passages alpins et jours ouvrables, et à les négocier dans le cadre d’une bourse sur Internet. Il y a deux ans, une première étude de faisabilité avait déjà conclu que «la bourse du transit alpin est, pour la politique des transports, un instrument réalisable et efficace en termes de moyens comme en termes d’impact.»
Selon cette nouvelle étude, la BTA est compatible avec les principes de droit définis dans l’Accord sur les transports terrestres. Le seul problème réside dans l’attribution contre paiement des premières unités de passage alpin, comme le prévoit le Département fédéral des transports (DETEC). Toutefois, si – comme le propose l’Initiative des Alpes – les unités de passage alpin sont distribuées gratuitement et de manière non discriminatoire sous forme de bonus pour l’utilisation du rail, la BTA peut être introduite sans modification de l’Accord sur les transports terrestres. Cette possibilité n’est malheureusement pas examinée sérieusement par les auteurs de l’étude.

Introduction par voie d’ordonnance
L’article 84, alinéa 2 de la Constitution fédérale stipule: «Le trafic de marchandises à travers la Suisse sur les axes alpins s’effectue par rail. Le Conseil fédéral prend les mesures nécessaires.» L’Initiative des Alpes conteste donc l’idée qu’une loi soit nécessaire pour introduire la BTA. Si la volonté politique est là, alors la réalisation est possible par voie d’ordonnance, car une ordonnance du Conseil fédéral fondée directement sur la Constitution équivaut à une loi. Le principe de légalité est ainsi respecté. Selon le professeur zurichois Heribert Rausch, «le principe selon lequel l’organe chargé de la mise en œuvre législative d’un mandat constitutionnel – en l’occurrence le Conseil fédéral – peut introduire tout instrument proportionné ainsi que matériellement et juridiquement approprié, s’applique». Pour Sergio Salvioni (PRD-TI), juriste et ancien conseiller aux Etats, déléguer au Conseil fédéral, conformément à l’article constitutionnel sur la protection des Alpes, la compétence de prendre des mesures en vue du transfert modal, constitue un mandat impératif donné à l’exécutif: «Si le Conseil fédéral se soustrait à cette obligation, il enfreint gravement le mandat qui lui a été confié.» Dans une expertise de 1993 destinée au Département fédéral des transports, des communications et de l’énergie (DFTCE), le professeur Paul Richli plaidait déjà pour la voie de l’ordonnance.

Mépris de la loi et de la Constitution par le Conseil fédéral
Le Conseil fédéral a d’ailleurs tendance à prendre beaucoup de libertés avec la charte fondamentale du pays. En effet, et contrairement à ce que stipule l’article 33 de la Constitution fédérale, il n’a pas pris officiellement connaissance de notre «consultation populaire», pourtant signée par près de 40’000 personnes. Seul le Département compétent – le DETEC – a réagi à cette pétition, mais sa lettre est vide de sens et n’engage nullement les autorités fédérales.
De plus, le gouvernement n’a que faire des délais inscrits dans la Constitution et la loi. Au mépris de la disposition transitoire relative à l’article constitutionnel sur la protection des Alpes, il a proposé l’an dernier de repousser le transfert modal de dix années supplémentaires au minimum, et cela sans modification constitutionnelle. Et en dépit de la loi sur le transfert de trafic, il n’a pas encore présenté son message relatif à la loi sur le transfert du trafic marchandises, alors que le Parlement l’attendait pour 2006 au plus tard.