26. octobre 2020

200 personnes engagées pour la protection du climat et la justice climatique se sont donné rendez-vous au pied d’un glacier valaisan le dimanche 6 septembre afin d’attirer l’attention des Suisse-sse-s et du monde politique. Le programme était riche et varié et le paysage magnifique, à l’exception du glacier du Trient, qu’on pouvait apercevoir dessous les nuages, mais bien trop loin en raison de sa fonte.

Ils marchent tous en file indienne en ce dimanche 6 septembre 2020 depuis le col de la Forclaz en direction du glacier du Trient VS. Il y a des familles avec enfants, des adultes venus en petits groupes, des jeunes, des moins jeunes, certains qui portent des drapeaux. Ils sont environs 200 à longer le bisse à travers des forêts de sapins et de mélèzes jusqu’à la Buvette du Trient. Les participant-e-s ne souffrent pas de la chaleur, le ciel est couvert. Si nous sommes tous réuni aujourd’hui, c’est pour rendre hommage aux 500 glaciers qui ont disparus ces dernières années en Suisse. Dans une heure, nous pourront tous admirer ce qui reste de ce magnifique glacier du Trient depuis la Buvette et lui rendre hommage.

Commémoration pour les glaciers; alliance-climatique.ch

Une vingtaine d’organisations engagée pour la protection de l’environnement se sont donné rendez-vous au pied de ce glacier valaisan, histoire de rappeler que ce que nous voyons aujourd’hui aura sûrement disparu en 2100. La langue glacière du glacier du Trient a perdu ces 30 dernières années près d’un kilomètre. Actuellement, déjà 500 glaciers ont disparu en Suisse, et, selon une étude de l’EPFZ, avec +2°C à la fin du siècle, il n’en restera plus que 40, contre 1’400 aujourd’hui.

A la fin du XIXème siècle, le glacier du Trient était exploité pour sa glace. Entre 20 et 30 tonnes de glace étaient en effet acheminées chaque jour vers Martigny, d’où elle partait, en train, refroidir les boissons servies à Genève, Lyon, Paris et Marseille. Il faut dire que le glacier connaissait des crues impressionnantes. Mais ceci n’est plus le cas en raison du réchauffement climatique et de la quantité de CO2 émise par l’activité humaine. Le glacier recule chaque année de plusieurs dizaines de mètres depuis plus de 30 ans.

Plusieurs personnalités ont été invitée par l’Alliance climatique à cet événement. Le Vaudois Jacques Dubochet, qui a reçu le prix Nobel de chimie et qui est un ardent défenseur de la cause climatique, était sans doute la star de la journée. Ça lui a fait mal au ventre de voir ce glacier reculer aussi rapidement. Lors de son discours, il a prôné l’arrêt au recourt à l’énergie fossile. Puis, les prises de paroles se sont suivies durant l’après-midi. Olivier Couach, Conseiller communal du Trient témoigne, lui, de l’accélération du recul du glacier depuis ces 10 dernières années et a rappelé qu’en 1980, le glacier arrivait encore jusqu’à la buvette alors que maintenant il faut marcher une bonne heure pour y arriver. Ce recul entraine une hausse des dangers naturels (éboulements, fonte du permafrost, chutes de sérac, etc.). L’invitée Léa Klaue, snowbordeuse professionnelle, connait bien le milieu de la montagne : aller toujours plus haut, rechercher toujours plus de poudreuse, plus de pente, avoir des sponsors, etc. Son appel ? Moins consommer la montagne, car «on est peu de chose sur un glacier, mais en fait, on est bien plus gros que ça».

Si, en Suisse, les glaciers fondent, au Sud, la situation est bien différente. Yvan Maillard Ardenti de Pain pour le Prochain et César Murangira, membre de la diaspora du Rwanda peuvent en témoigner. A cause de la sécheresse, des vents tempétueux et de l’érosion des sols, les Africains ne savent plus quand semer ni planter, tellement les saisons sont bouleversées. Marcelo Zamuriano, docteur en sciences climatiques originaire de Bolivie parle pour son pays, situé dans les Andes et fait le même constat : les glaciers fondent. Comment l’éviter ? « Il faut éviter à tout prix la déforestation de l’Amazonie ». Quand on abat des arbres, c’est un puit de carbone qui disparaît et doncencore plus de CO2 dans l’atmosphère.

Et la suite ?

Que fait-on et que peut-on faire ? Un peu d’espoir avant de reprendre le sentier et manger une bonne tarte aux abricots. Tout d’abord il y a le Conseil fédéral qui a ouvert la procédure de consultation sur le contre-projet direct relatif à l’initiative pour les glaciers. « Même si ça avance lentement, ça avance » informe Myriam Roth, co-présidente de l’initiative pour les glaciers. Ensuite il y a le combat des Aînées pour la protection du climat, représentée aujourd’hui par Anne Mahrer, ancienne conseillère nationale Vertes/GE et co-présidente de l’association. Elle explique qu’en 2016, les Aînées pour la protection du climat ont adressé une action en justice à la Confédération pour demander un renforcement de la protection du climat à l’égard des droits fondamentaux à la vie et à la santé. Ces droits sont actuellement bafoués par la non-action du gouvernement à prendre des mesures sérieuses pour lutter contre le réchauffement climatique. Le Tribunal administratif fédéral et le Tribunal fédéral ont rejeté leur requête. Ils font recourt actuellement à la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) à Strasbourg. Applaudissement ! Puis Myriam Grosse, membre du Collectif BreakFree Suisse, annonce une grande mobilisation à Berne du 20 au 25 septembre. Collectif Justice climatique, Extinction Rebellion, La Grève du Climat et le Collectif Break Free travailleront ensemble pour la première fois autour de plusieurs événements « Debout pour le changement » (Rise up for change). Enfin, il y a aussi eu la bénédiction du glacier du curé de Martigny Jean-Pascal Genoud, le chant des Boliviens, la loi CO2 qui sera discutée au parlement, et les milliers de personnes dans le monde qui liront les 51 articles qui ont été publiés sur cette action et qui, peut-être, on l’espère, changeront leurs habitudes pour permettre à nos glaciers d’être encore là dans 50 ans.

L’après-midi touche à sa fin. Tout le petit monde reprend le sentier. Les gens parlent entre eux de l’action que nous venons tous de vivre ensemble. Je me trouve à la même hauteur que Nicolas Walder, conseiller national Verts/GE et vice-président des Verts Suisse et il me dit : « j’aimerais bien que le gouvernement écoute plus les experts en environnement, comme il a su très le faire pour le covid-19 ». Le gouvernement finira bien par nous écouter, affaire à suivre.

Photos de l’évenement : http://www.flickr.com/photos/klima-allianz-ch/